Chère lectrice, cher lecteur,
Bien que la collection « Repères » vienne de loin, née au siècle précédent, elle ne traverse pas l’Histoire sans rencontrer l’actualité. En témoignent les trois titres de cette livraison.
Le premier, signé par Martin Baloge, traite de La Politique en Allemagne. Notre voisin a longtemps été considéré comme un modèle, qu’il s’agisse de sa puissance industrielle, de la compétitivité de son économie, de son taux de chômage… Mais la guerre en Ukraine a révélé ses faiblesses, notamment sa dépendance énergétique et à la conjoncture mondiale, au point que l’on révise désormais le bilan des années Merkel. Comme d’autres, mais plus que la France, c’est un pays confronté au vieillissement, dont l’horizon s’assombrit. Cela n’est pas sans conséquence sur le plan politique. L’AfD, désormais le deuxième parti allemand selon les sondages, pourrait remporter les élections fédérales de 2025. Les raisons de s’intéresser à ce qui se passe outre-Rhin n’ont jamais été aussi nombreuses. Ce « Repères » remplit sa fonction en fournissant des clés pour l’analyse d’un système politique que nous connaissons plus mal que nous ne l’imaginons.
Le deuxième titre de cette série ne manque pas d’originalité : Géopolitique des petites puissances. En effet, on ne s’intéresse généralement qu’au jeu des « grandes puissances ». Si l’on s’en tient à des critères apparemment objectifs (territoire, population, PIB, dépenses militaires, conquête spatiale, etc..), il n’y a pas de place pour les autres pays, qui sont voués au rôle de supplétifs, de vassaux, au sein d’alliances plus ou moins étendues. Pourtant, les grands sont parfois défaits, comme les États-Unis au Vietnam ou l’URSS en Afghanistan, ces seuls exemples en évoquant d’autres. La puissance au sens habituel se réfère de façon statique à des ressources qui déterminent des potentialités, mais importent ensuite l’action, résultant des choix stratégiques, et la complexité du réel, pour partie imprévisible. Dans le cas de l’Ukraine, qu’il s’agisse de l’entrée en guerre de la Russie ou de l’enlisement de son offensive, nombre d’« experts » se sont discrédités en ne prévoyant pas cette résistance. La thèse de Thibault Fouillet est que l’on sous-estime trop souvent la marge d’action des petites puissances. Certes, elle s’exerce plus souvent sous la forme du soft power, comme dans le cas du Qatar, mais elle constitue l’un des facteurs à prendre en compte dans l’analyse géopolitique.
Le troisième titre est la nouvelle édition du « Repères » de Bastien François, Le Régime de la Ve République. Celle-ci vient de battre le record de longévité des Constitutions, devançant celle de la IIIe République. À cet âge, il n’est pas inconvenant de se soucier de son état de santé. Pour les uns, cette durée est la preuve de sa capacité d’adaptation ; pour d’autres, le moment est venu de songer à la VIIe. Quoi qu’il en soit, changer de régime mérite un peu de réflexion, éclairée par ce livre.
En attendant la VIe, je vous souhaite une excellente lecture,
Pascal Combemale